On l’entend partout, surtout chez les Français : « Regarde la Suisse, eux au moins ils s’en sortent », ou « la Suisse n’a pas de problème ». Salaires confortables, quasi-neutralité militaire, bunkers antiatomiques à tous les étages… Sur le papier, la Suisse ressemble à une petite utopie nichée dans les Alpes. Mais est-ce que ce modèle suisse est vraiment transposable à la France ?
PS : comme d’habitude, je vous mets des vidéos tout au long du sujet pour enrichir cette réflexion car ce n’est pas aussi simple que « oui » ou « non », vous vous en doutez !
Sommaire
💰 Les salaires suisses ? Une autre planète ?
En Suisse, le salaire médian avoisine les 6 700 CHF brut, soit environ 7000 euros brut mensuel en France. Oui, tu as bien lu. Une caissière peut gagner 3800 euros (3700 chf), un technicien 5500 euros.
MAIS : il faut aussi préciser qu’un loyer à Genève coûte un rein et demi (plutôt 1400 euros en moyenne) et il faut compter environ 17 euros pour un McDo à Zurich. Pour l’assurance maladie, ça peut facilement monter à 300 à 500 euros par mois.
Bref, la Suisse gagne plus, mais dépense aussi beaucoup plus. Les salaires sont plus hauts, oui, mais le prix de la vie est plus haut aussi.
Appliquer ça en France ? On risquerait de cramer la moitié des protections sociales qu’on a mis un siècle à construire. Pour cause, il y a beaucoup moins d’aides sociales et de protection médicale en Suisse qu’en France.
🧱 Les bunkers suisses : parano ou prévoyants ?
La Suisse compte plus de 370 000 abris antiatomiques, capables d’accueillir toute la population en cas de guerre nucléaire. Une loi de 1963 impose même aux citoyens d’avoir un abri ou une place réservée dans un bunker collectif.
Pourquoi ? Parce qu’entre la Guerre Froide, sa position neutre et ses montagnes, la Suisse a toujours anticipé le pire. En France, à part les bunkers présidentiels et les caves à vin, on a zéro système équivalent.
Pour beaucoup de Français, avec la guerre en Ukraine et le contexte actuel, il serait bon de prendre exemple sur la Suisse de ce côté.
👉 Importable chez nous ? Peut-être. Mais le coût serait colossal, et la population française est huit fois plus nombreuse (68 millions contre 8 millions en Suisse). Tu veux construire des bunkers pour tout le monde ? Il faudra lâcher 500 milliards, minimum.
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🕊️ La neutralité suisse : le luxe d’un petit pays
La Suisse ne fait pas partie de l’Union européenne et elle s’engage visiblement rarement militairement, malgré un service militaire obligatoire, contrairement à la France (sur ce sujet, beaucoup de Français pensent que nous devrions faire comme la Suisse, justement pour apprendre à se protéger).
Elle vend des montres, pas des Rafales. Elle accueille les négociations, elle ne les impose pas. C’est le diplomate de la soirée, celui qui sert les verres, mais ne se bat jamais.
Mais cette posture n’est possible que parce que la Suisse est petite, donc un peu moins menaçante. Elle est riche, donc respectée, également. Mais aussi, elle est entourée de l’UE, donc protégée par procuration.
👉 Si la France décidait de faire profil bas ? On la verrait comme une puissance en déclin, lâche ou égoïste. Le poids politique de la France vient aussi de ses engagements. Se retirer du jeu mondial, c’est dire adieu à notre rôle diplomatique.
L’Europe : le dilemme impossible ?
La Suisse dit non à l’Europe. Et pourtant, elle est complètement dépendante de l’UE : elle fait partie de l’espace Schengen, applique plein de directives européennes, et réalise plus de 50 % de son commerce extérieur avec l’UE.
Mais elle garde sa monnaie, son indépendance législative… et doit constamment renégocier ses accords avec Bruxelles, sans jamais avoir son mot à dire dans les grandes décisions.
En France, sortir de l’UE, c’est un autre délire. On est un des piliers du projet européen. On a contribué à l’euro, on est un moteur politique et militaire. Se « suissiser » reviendrait à perdre notre place à la table et à jouer les freelances dans un monde de multinationales.
D’autant qu’Emmanuel Macron adore l’UE, nous versons plus de 20 milliards chaque année pour en être membre et nous avons donc sa protection. Mais, face à cela, la France est aussi endettée à cause de la délocalisation de ses productions et de règles européennes, entre autres. Donc, l’UE n’a pas que du bon.
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🧮 Une question d’échelle (et de mythe)
La Suisse compte plus de 8 millions d’habitants quand la France compte 68 millions de citoyens. De son côté, la Suisse a 26 cantons et la France a 101 départements, une dizaine de langues régionales, des DOM-TOM, un héritage colonial lourd.
Le modèle suisse fonctionne parce qu’il est petit, homogène, consensuel. Le modèle français est centralisé, historique, bordélique, mais puissant.
Et entre nous, rêver de devenir la Suisse, c’est un peu comme fantasmer sur la vie d’un ermite qui n’a pas d’enfant, pas de voisins, pas de dettes et pas de conflits : beau sur Instagram, mais invivable à l’échelle d’un pays comme le nôtre.
Et vous, vous préféreriez quoi ? Une France plus neutre, plus fermée, plus protégée ? Ou une France qui continue d’avoir un mot à dire, quitte à se prendre des coups ?
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